Deux ans après la chute d'Alpha Condé, le RPG Arc-en-ciel se drape toujours dans le manteau du déni. Dans les salons feutrés de l'ancien parti au pouvoir, on ne parle ni d'erreurs stratégiques ni de l'usure du pouvoir, mais de complot, de trahison et d'injustice. Pour ses fidèles, l'histoire devra absoudre leur champion, renversé, selon eux, par une junte qui n'attendait qu'une occasion. Mais la réhabilitation d'Alpha Condé est-elle seulement envisageable ?
Un putsch écrit d'avance ?
Au RPG Arc-en-ciel, la version officielle est bien rodée. "Le troisième mandat d'Alpha Condé n'était qu'un prétexte. La junte avait déjà planifié son putsch," clame Marc Yombouno, ancien ministre et fervent défenseur du régime déchu. Il voit dans l'enthousiasme de certains acteurs politiques à l'annonce du coup d'État la preuve d'une conspiration latente. "L'alternance, c'est par les urnes, pas par les armes," assène-t-il, fustigeant ceux qui, selon lui, ont préféré le chaos à la démocratie.
Alpha Condé, victime ou artisan de son propre sort ?
Si le RPG Arc-en-ciel plaide pour la réhabilitation de son leader, la question reste de savoir si Alpha Condé a respecté les règles du jeu. "Aucun texte de loi n'a été violé", martèle Yombouno, défiant les juristes de prouver le contraire. Pourtant, la communauté internationale, tout comme une grande partie de la société civile guinéenne, n'avait pas la même lecture des événements en 2020.
L'argument de la légalité bute aussi sur la mémoire collective. Sous Alpha Condé, les manifestations étaient violemment réprimées, les opposants traqués, les libertés malmenées. Yombouno prétend que "contrairement à aujourd'hui, sous Alpha Condé, il n'y avait pas de disparitions forcées". Mais qu'en est-il des dizaines de manifestants abattus lors des protestations contre le troisième mandat ? Des opposants incarcérés sur des accusations floues ?
Le troisième mandat, une erreur fatale
Yombouno tente de relativiser la réforme constitutionnelle de 2020 en s'appuyant sur l'histoire : "Quelle constitution n'a jamais été amendée ?". Mais l'analogie avec les 27 amendements de la Constitution américaine fait sourire. Ce que la Guinée a vécu, c'est un président modifiant les règles pour rester au pouvoir, contre vents et marées. Un passage en force qui a fracturé le pays et affaibli le régime Condé au point de le rendre vulnérable au coup de force militaire.
Un retour en grâce improbable
Le RPG Arc-en-ciel rêve d'une justice réparatrice. "Si certains demandent pardon à Dadis Camara, alors tous les acteurs politiques devraient aujourd'hui demander pardon à Alpha Condé", lance Yombouno. Mais peut-on mettre sur un même pied un capitaine au pouvoir une année et un président qui a gouverné pendant onze ans, avec tous les moyens de l'État ?
Malgré les déclarations belliqueuses de ses cadres, le RPG Arc-en-ciel peine à exister dans le paysage politique actuel. La page Alpha Condé semble définitivement tournée, et la Guinée, sous régime militaire, attend toujours un retour à l'ordre constitutionnel. Mais une chose est certaine : le pays n’a pas fini de débattre de son passé récent, ni de ceux qui en ont été les artisans.
Alpha Amadou Diallo