Le secrétaire d'État américain, Antony Blinken, a réaffirmé vendredi 13 décembre l'« engagement » des États-Unis en faveur de la sécurité de l'Irak, et promet que Washington empêchera la résurgence du groupe jihadiste État islamique. Des déclarations faites lors d'une visite inopinée à Bagdad alors qu'il cherche à coordonner une approche régionale de la situation en Syrie après le renversement de Bachar el-Assad.
Le chef de la diplomatie de l'administration Biden, qui a entamé sa tournée jeudi 12 décembre en Jordanie, s'est envolé pour la capitale irakienne depuis la capitale turque Ankara et s'est entretenu avec le Premier ministre irakien Mohamed Chia al-Soudani, a constaté un journaliste de l'AFP l'accompagnant.
À l'issue de ses entretiens, M. Blinken a réaffirmé l'« engagement » des États-Unis « à travailler avec l'Irak sur la sécurité et à toujours œuvrer pour la souveraineté de l'Irak, afin de s'assurer qu'elle soit renforcée et protégée ».
Il a aussi promis que les États-Unis, qui maintiennent environ 2 500 soldats en Irak et 900 en Syrie, œuvreront pour empêcher toute résurgence du groupe État islamique (EI).
L'Irak « attend des actes » du nouveau pouvoir en Syrie
Le Premier ministre irakien Mohamed Chia al-Soudani a déclaré vendredi que son pays attendait des « actes et non des paroles » des nouvelles autorités en Syrie voisine, qui ont renversé le pouvoir de Bachar el-Assad.
À l'issue d'une rencontre à Bagdad avec le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken, il a souligné « l'importance que les nations amies aident les Syriens à reconstruire leur État ». « L'Irak attend des actions concrètes, et pas seulement des mots, de la part de ceux qui gèrent la phase de transition en Syrie ».
L'Irak comme la Syrie ont souffert de l'insurrection du groupe ultra-violent État islamique (EI) qui avait établi il y a dix ans un califat autoproclamé s'étendant de part et d'autre de leur frontière.
Dès dimanche, le gouvernement irakien a appelé au « respect » de la volonté du peuple syrien, mais aussi de l'intégrité territoriale de la Syrie.
Les autorités irakiennes, dont la mission diplomatique à Damas a déjà repris son activité, tient par-dessus tout à empêcher une propagation de troubles en provenance de Syrie.
Jusqu'à présent, l'administration du président Joe Biden avait convenu avec l'Irak de mettre fin à la présence militaire de la coalition d'ici à septembre 2025, sans dire ce qu'il adviendra des troupes américaines, dont la présence est combattue par des groupes armés chiites irakiens proches de l'Iran.
Avec l'entrée en fonction le mois prochain du président élu Donald Trump, il est difficile de savoir s'il reviendra sur cet accord ou changera de tactique à la lumière des événements en Syrie.
Blinken a rencontré vendredi à Ankara son homologue turc Hakan Fidan
« Le ministre turc des Affaires étrangères et moi, nous nous sommes rencontrés pour discuter de la situation en Syrie et de l’importance d’une transition dirigée et contrôlée par les Syriens. Nous avons également évoqué la nécessité de protéger les droits et libertés des Syriens, y compris des membres des minorités, en cette période charnière », a écrit sur le réseau social X le diplomate américain.
Antony Blinken à Ankara pour parler de transition politique en Syrie
Entre les États-Unis et la Turquie des positions divergentes au sujet des forces kurdes
Avec notre correspondante à Ankara, Anne Andlauer
Le secrétaire d'État américain Antony Blinken était en visite en Turquie jeudi 12 décembre et vendredi, où il a rencontré le président Recep Tayyip Erdogan et son homologue turc Hakan Fidan. Avec ses interlocuteurs, le responsable américain a surtout parlé de la Syrie, cinq jours après le renversement du régime de Bachar el-Assad. Officiellement, Ankara et Washington – deux alliés au sein de l'Otan – ont les mêmes priorités : stabilité de la Syrie et lutte contre le terrorisme. Mais leur position diverge au sujet des forces kurdes.
À Ankara, Antony Blinken est bien sûr venu parler de transition politique en Syrie. Les États-Unis, comme la Turquie, ont intérêt à ce que celle-ci ne génère pas de nouveaux conflits. Les autorités turques, qui ont soutenu pendant 13 ans une partie des rebelles et discutent depuis des années avec le groupe Hayat Tahrir al-Sham, sont à ce titre un interlocuteur privilégié des États-Unis.
Ankara et Washington donnent la priorité à la stabilité et à la lutte contre le terrorisme. Mais ces mots n'ont pas le même sens dans les deux capitales. Antony Blinken a insisté sur le groupe État islamique – dont les États-Unis craignent qu'il profite de la situation pour gagner du terrain. Washington tient donc à ce que la coalition internationale poursuive sa mission contre les jihadistes.
Mais leurs principaux alliés sur le terrain, les forces kurdes des YPG, sont considérées comme des terroristes par Ankara. Les rebelles pro-turcs ont d'ailleurs profité de l'offensive anti-Assad pour contraindre ces forces kurdes à quitter l'ouest de l'Euphrate. Nul doute qu'Antony Blinken est donc aussi venu en Turquie pour lui demander de ne pas progresser à l'est du fleuve, où quelque 900 soldats américains soutiennent les YPG. Réponse du président Erdogan : « La Turquie prendra des mesures préventives contre tous les groupes terroristes ».
RFI