Conakry, quartier de Bambéto – Ce matin, l’air est chargé d’attentes et de doutes sur l’esplanade où Bah Oury, Premier ministre guinéen, s’adresse à une foule de jeunes venus de toute la périphérie de l’Axe. Dans son allocution, il annonce la création imminente d’une banque dédiée aux jeunes entrepreneurs de cette zone souvent marginalisée. Une déclaration qui fait naître un mélange d’espoir et de scepticisme parmi les auditeurs.
L’annonce n’est pas anodine. En partenariat avec les Nations Unies, le gouvernement promet un outil financier conçu pour favoriser l’initiative privée dans une région où l’accès au crédit relève du parcours du combattant. Mais dans l’assemblée, certains murmurent déjà : « Encore des promesses ? »
Entre espoir et prudence
Sory Camara, 29 ans, entrepreneur en herbe, écoute attentivement. Depuis trois ans, il tente de lancer son atelier de menuiserie, mais faute de financement, son projet stagne. « Si cette banque devient une réalité, ce serait une révolution pour nous », confie-t-il, le regard brillant d’enthousiasme. « Mais combien de fois a-t-on entendu des discours sans lendemain ? »
À quelques mètres de lui, Mariama Diallo, vendeuse de vêtements en ligne, affiche un sourire désabusé. « On nous dit de nous préparer, mais avec quels moyens ? » interroge-t-elle. Pour elle, la question de la transparence et de l’accessibilité des fonds est cruciale. « Si c’est encore un système où seuls ceux qui ont des connexions en profitent, ça ne changera rien pour nous. »
Un tournant historique ?
Face à ces interrogations, Bah Oury insiste : « L’opérationnalisation de cette banque doit vous trouver prêts. » Une injonction qui laisse certains perplexes. Dans ce quartier où la jeunesse a longtemps été stigmatisée et confrontée à une marginalisation économique et sociale, les promesses officielles ont souvent été synonymes de désillusions.
Pourtant, si ce projet se concrétise avec des mécanismes de financement transparents et inclusifs, il pourrait représenter une avancée majeure. « Ce serait la première fois qu’on reconnaît notre potentiel entrepreneurial et qu’on nous donne les moyens d’agir », estime Sory Camara.
Mais en attendant des actions concrètes, la méfiance reste de mise. « Nous avons trop entendu de belles paroles », conclut Mariama Diallo. « Cette fois, on jugera sur les actes. »
En attendant, dans les rues de l’Axe, l’annonce résonne comme un pari sur l’avenir. Un pari dont seule la réalité du terrain confirmera ou non la portée historique.
Abdoul Chaolis Diallo