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Les allers-retours, courant février et mai 2019, entre Conakry et Paris via Abidjan, de l’ancien président français, Nicolas Sarkozy, médiateur dans le contentieux opposant le groupe BSG Resources à la Guinée sont sources de préoccupations. Pourtant l’implication de M.Sarkozy a permis de régler ce différend à l’amiable . Qui entérine l’abandon des poursuites réciproques entre partenaires et la sortie du groupe BSG Resources des blocs 1 et 2 de Simandou. En contrepartie, le groupe BSG Resources a accepté de se faire remplacer par la société Niron Metals PLC dans l’exploitation de Zogota. Cette nouvelle actrice n’aurait toujours pas obtenu, le droit de transit « définitif et complet », de sa production minière par les infrastructures libériennes (Nimba-Yekepa-Buchanan).

En effet, ArcelorMittal Liberia (AML), le concessionnaire du chemin de fer Yekepa-Buchanan, ne serait pas favorable à l’utilisation de ces infrastructures par un tiers, et prétexte qu’il n’y a pas de capacité excédentaire de transport pouvant accommoder les besoins de tiers, d’autant plus qu’il a lui-même besoin, pour faire face à la baisse de qualité de son minerai brut, d’augmenter la production afin d’alimenter une installation d’enrichissement avant exportation.

Il reste à la Guinée une autre option Stratégique : La route ivoirienne. L’évacuation de la production minière de Nimba et de Zogota par le port de San Pédro en Côte d’Ivoire. En tout cas, lors du point de presse d’avril 2019 des présidents de la Côte ’Ivoire et de la Guinée, Alassane Ouattara a annoncé la tenue de la réunion de la 3ème session de la commission mixte de coopération, devant plancher, entre autres, sur l’exportation du minerai de fer de Nimba et du minerai de l’Ouest par le port de San Pédro.

Pour contrecarrer le refus d’ArcelorMittal Libéria de mutualiser ses infrastructures de Yekepa-Buchanan (dont-elle est concessionnaire) le gouvernement guinéen entend proposer au gouvernement libérien, une révision « anticipée » du mineral development agreement (la convention qui régit son projet minier et la gestion des infrastructures de transport et d’évacuation).

 Pour éviter que les projets miniers se jouent des gouvernements de la Guinée et du Libéria, des experts guinéens notent qu’il est nécessaire que les deux pays coordonnent étroitement leurs

positions, afin d’intervenir comme une seule entité dans les négociations avec ces projets.

Le lobbying que les Guinéens comptent intensifier devrait aboutir à une union des forces. À ce titre, les deux pays constitueront rapidement un groupe technique restreint, afin de poursuivre les concertations et de recommander à un groupe plus large d’acteurs institutionnels (impliquant tous les secteurs concernés), les mesures permettant d’accélérer la concrétisation du passage par le Libéria de certains projets miniers guinéens.

Pour faciliter l’alignement des deux gouvernements sur un certain nombre de sujets-clés impactant les relations contractuelles, tant avec les propriétaires/concessionnaires d’infrastructures au Libéria qu’avec les projets miniers transitant par le Libéria, le protocole intergouvernemental relatif au transit par le Libéria sera décliné dans un projet d’accord un peu plus détaillé, dénommé accord d’implémentation.

Il permettra ainsi d’encadrer de façon plus spécifique, les bases sur lesquelles des accords commerciaux seront négociés et conclus individuellement entre les projets miniers guinéens et les parties prenantes désignées côté libérien. La partie guinéenne soumettra, dans les meilleurs délais, une proposition des principes de base de cet accord.

Pour avancer vite sur cette lancée, la Guinée va partager avec le Libéria son expérience dans la mise en place du premier contrat multi-utilisateurs du chemin de fer de Boké (corridor nord-ouest). À ce titre, la Guinée mettra à la disposition du Libéria des conseils techniques et juridiques qui avaient aidé à la mise en place du contrat multi-utilisateurs en 2015 (avec l’appui de la Banque mondiale), afin de faire une première analyse stratégique du contrat entre le Libéria et ArcelorMittal et d’identifier les options pour l’action du gouvernement.

La Guinée a rappelé que le dernier des accords intergouvernementaux conclus avec

le Libéria pour l’évacuation de produits miniers guinéens via le territoire libérien est le Protocole de Facilitation du Transport des Ressources Naturelles d’origine guinéenne (Protocol to Facilitate the Transport of Guinean-based Natural Resources), signé le 25 octobre 2013 par les deux Chefs d’État, Alpha Condé de la Guinée et Ellen Johnson Sirleaf du Liberia.

La vision guinéenne voulait que ce protocole traduise la volonté politique des dirigeants des deux pays. Il doit être rendu opérationnel, afin de satisfaire les demandes déjà formulées par des projets miniers. Cela a été réaffirmé lors de l’entretien d’avril 2019, entre le président Alpha Condé et son homologue libérien, Georges Weah à Dakar au Sénégal.

C’est dans cette optique, qu’une lettre de M.Abdoulaye Magassouba, ministre guinéen des mines et de la géologie a été envoyée, le 20 mars 2019, à son homologue, M. Gesler E. Murray du Libéria, afin d’initier les discussions relatives aux dispositions concrètes à prendre en vue de répondre effectivement aux besoins exprimés par les projets miniers guinéens.

Pour accélérer cette dynamique, conformément aux directives du président guinéen, une délégation libérienne a été invitée aux assises du 6e Symposium Mines Guinée du 24 au 26 avril 2019, à Conakry. En marge dudit symposium, des consultations préliminaires ont été organisées avec la délégation libérienne qui était composée de Messieurs Molewuleh B. Gray, président de la National Investment Commission (NIC) et Gregory O. W. Coleman, directeur général du National Bureau of Concession (NBC), qui sont les acteurs-clés pour l’utilisation d’infrastructures libériennes. Par la suite, le Président de la NIC a confirmé au ministre Magassouba, avoir rapporté au président George Weah qui a réitéré son soutien aux démarches engagées dans l’application de la volonté que le président Condé lui avait réaffirmé lors de leur récent entretien à Dakar sur ce sujet.

En perspective de la relance du projet de minerai de fer de Simandou, M. Biro Diallo, le tout nouveau « Country Manager » du projet Simandou en Guinée multiplie ses déplacements en Australie, Chine, Royaume Unie et France. Le 16 mai, Biro a été en Chine pour des rencontres diverses avec des dirigeants de la société Chinalco, partenaire de Rio Tinto dans la mise en œuvre du projet de minerai de fer de Simandou (Simandou sud).

Pendant la même période, les 16 et 17 mai, M. Mohamed Lamine Sy Savané, directeur général du Centre de Promotion et de Développement Minier (CPDM), menait une opération de charme auprès des investisseurs miniers chinois réunis à Zengzhou, dans le cadre du 10ème sommet sur l’Aluminium.

De leur côté, le gouvernement guinéen et ses conseils affûtaient leurs armes à Paris, en prélude aux rencontres avec les investisseurs du projet de minerai de fer de Simandou sud, en juin 2019. Une équipe restreinte de cadres guinéens ont réfléchi avec des conseils, d’éventuelles pistes de solutions en vue de relancer le projet Simandou.

A son tour, le 24 mai, Biro Diallo se devait d’être à Londres, afin de faire le compte-rendu des discussions avec l’équipe de Chinalco Iron Ore Holding et plancher sur des éventuelles hypothèses de relance du projet Simandou avec la direction générale de Rio Tinto PLC.

Une source diplomatique à Conakry a indiqué qu’en raison de la proximité de la Guinée avec la Chine, Rio Tinto semble avoir opté pour une plus grande implication de Chinalco dans la reconquête globale du projet Simandou y compris les blocs 1 & 2.

Un soutien local de Chinalco à Conakry croit savoir que Chinalco est disponible pour jouer un rôle majeur dans l’identification des voies et moyens de récupération de l’entier Simandou, même si cela exigerait de l’aide de la Turquie, la France, la Russie ou encore des chefs d’État des pays voisins de la Guinée.

D’ailleurs, le 3 juin 2019, M. Biro Diallo a invité le ministre Magassouba à une réunion tripartite (Rio Tinto, Chinalco et gouvernement guinéen), prévue le 15 juin 2019, à Paris. Il était question de faire une mise à jour sur les avancées du projet Simandou sud, depuis la rupture de contact avec le gouvernement guinéen, le 1er décembre 2018.

Selon cette invitation de Biro Diallo, les partenaires chinois seront fortement représentés à cette réunion, par Feng Guiquan (vice-président Chinalco), Beau Yu (président du CIOH) et l’interprète Hou Monroe.

Les actionnaires du projet Simandou sud veulent débuter la production commerciale du minerai de fer. Avec une capacité annuelle de 5 millions de tonnes extensible à 90 millions de tonnes par an, selon 5 hypothèses soumises à l’appréciation de la Guinée.

C’est pour ces raisons que cette réunion du 15 juin à Paris, avait effectivement abordé les cinq différentes options, relatives aux infrastructures de transport du minerai de Simandou, dont deux concernent le Liberia, une la Côte d’Ivoire et les deux dernières guinéennes.

Au même moment, le ministère des mines et de la géologie finalisait à l’attention du conseil des ministres le rapport portant sur la négociation d’une convention de base amendée et consolidée relative au projet Nimba.

 

Ce présent rapport ministériel a ainsi pour objet d’éclairer le conseil des ministres sur l’opportunité ou non d’autoriser l’octroi du consentement de la reprise du projet Nimba par le groupe High Power Exploration (HPX).  Qui prendra la forme d’une cession de l’intégralité des actions d’Euronimba (BHP Billiton, Newmont LaSource et CFMM) à HPX et la signature de la convention amendée.

 

Ce rapport indique que, le groupe HPX, agissant par l’intermédiaire de la société HPX Nimba Holdings Inc une société affiliée au groupe Ivanhoé, a initié des discussions avec les actionnaires d’Euronimba et l’État, en vue du rachat par HPX de la totalité des actifs du projet de minerai de fer de Nimba.

Déjà, les discussions entre la Guinée, HPX et les actionnaires actuels d’Euronimba ont à ce jour abouti à la signature par l’État et HPX, le 17 novembre 2018, d’un protocole d’accord déterminant les modalités selon lesquelles l’État pourrait octroyer son consentement formel aux actionnaires de Bhp Billiton, Newmont LaSource et CFMM à vendre leurs actifs à HPX. La finalisation et la validation par l’ensemble des parties prenantes (groupe de négociation de la Guinée, HPX, BHP Billiton et Newmont LaSource, CFMM), le 28 avril 2019, d’une version amendée et consolidée de la convention initiale sont une avancée significative vers la vente des actifs des monts Nimba.

 Selon le rapport du ministère au conseil des ministres, Orano et BHP Billiton avaient annoncé respectivement en 2011 et 2012, leurs décisions de se retirer du projet de minerai de fer de Nimba. Bhp Billiton en tant que partenaire Stratégique du projet Nimba était restée aux côtés de Newmont LaSource pendant toutes les négociations initiées en 2010. Ces négociations, suspendues à plusieurs reprises, ont finalement abouti en juillet 2013, dans le cadre des travaux du comité technique de revue des titres et conventions minières, à un texte d’accord sous la forme d’un avenant à la convention initiale, autorisant notamment le projet à utiliser le chemin de fer et le port libériens mis en concession par le gouvernement libérien auprès d’ArcelorMittal.

Ceci étant, malgré des multiples relances faites par le gouvernement guinéen, l’accord de juillet 2013 n’a finalement pas été signé par BHP Billiton et Newmont LaSource et est donc devenu caduc au premier trimestre 2014, après deux mises en demeure adressées par la partie guinéenne.

C’est au cours du second trimestre 2014, que la Guinée avait été informée par les sociétés Bhp Billiton et Newmont LaSource qu’elles n’avaient pas été en mesure de signer l’accord car elles attendaient une pré-entente avec ArcelorMittal qui s’était porté acquéreur des parts de AREVA et de BHP dans Euronimba. Selon le consortium Bhp Billiton/Newmont LaSource, la condition de finalisation de cette transaction était la signature de l’accord auquel elles étaient parvenues avec la Guinée en juillet 2013. Or, cet accord était devenu caduc.

Cette caducité se fondait sur le fait que Bhp Billiton et Newmont LaSource se faisaient prier pour signer les textes de l’accord de juillet 2013, alors qu’une évolution majeure du contexte du projet était intervenue. Notamment la finalisation et la signature en mai 2014 du cadre d’investissement du projet Simandou (avec Rio Tinto, Chinalco et SFI) qui obligeait la Guinée à mettre en œuvre une politique de mutualisation autour du Transguinéen mettant en valeur tous les projets miniers majeurs de la zone sud-est.

 

Dans ces conditions, bien que la Guinée eût été très favorable à l’entrée d’ArcelorMittal dans le projet, la finalisation de l’accord intervenu en juillet 2013, devait nécessairement se faire dans le respect des obligations contractuelles reliées au cadre d’investissement de Simandou-Sud. Or, ArcelorMittal n’était intéressée au rachat des actions de BHP Billiton et d’Areva que dans la mesure où les infrastructures dont elle est concessionnaire au Libéria seraient utilisées par la Société des Mines de Fer de Guinée (SMFG).

ArcelorMittal exprimait d’ailleurs ses inquiétudes quant à un accord d’infrastructures

qui venait d’être signé entre le Libéria et un autre projet guinéen (West Africa Exploration

de Sable Mining) dont les effets potentiels affecteraient très négativement sa position de concessionnaire du chemin de fer et du port de Buchanan. Même sa capacité à fournir des services pour l’évacuation par le Libéria de la production du projet SMFG serait déficitaire.

Conakry, le 05 août 2019

Akoumba Diallo : Cette adresse e-mail est protégée contre les robots spammeurs. Vous devez activer le JavaScript pour la visualiser.

Journaliste Analyste au cabinet Mineral Merit SARL

Ancien membre de l’ITIE-Guinée