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Dans un entretien exclusif qu’il nous a accordé au lendemain des récents pillages survenus à Kankan, Dr Mamady Kaba donne sa position sur le projet de nouvelle constitution. Par ailleurs, l’ancien président de l’Institution nationale indépendante des droits humains (INIDH), annonce la publication « bientôt » d’un livre sur le retard de la Guinée, avec des pistes de solution…

Bonjour Dr Kaba ! Depuis votre départ de l’INIDH on ne vous entend plus. Qu’est ce qui se cache derrière ce silence ?

Dr Mamady Kaba : Depuis mon départ de l’INIDH, je m’exprime quelques fois quand il y a impérieuse nécessité. Mais mon manque d’activisme est dû au fait que, j’ai compris mes avis n’étaient plus très utiles et il y avait des agendas contre lesquels je n’étais plus capable d’avoir une affluence. Donc j’ai pensé que c’était plus utile de me consacrer à mon écriture, tout en espérant que dans le futur il y aura une occasion de lutter pour avoir une meilleure institution des droits de l’Homme au sein de laquelle ce serait encore possible pour moi de prendre mon activisme et de servir la Guinée comme je souhaite le faire.

Alors depuis un certain temps le pays traverse des crises, parmi lesquelles cette question de nouvelle constitution qui divise les Guinéens. Quel regard portez-vous sur cette actualité ?

Mon regard est très simple. Si vous regardez dans le passé après le décès du général Lansana Conté, l’ensemble de la société civile et la classe politique était parvenu à la conclusion que la Guinée avait besoin de plus d’institutions, de verrou dans la constitution, de pouvoir pour le Premier ministre. Bref, la Guinée avait besoin d’une nouvelle constitution qui empêcherait désormais tout président de se cramponner au pouvoir, après ces deux mandats constitutionnels. Donc, il y a eu beaucoup de débats et de luttes et finalement on a obtenu la constitution que nous avons aujourd’hui qui a été obtenue en mai 2010. 

Mais depuis cette époque, si nous regardons le parcours de la Guinée, il n’y a pas eu tous les progrès qu’on souhaitait avoir à travers cette constitution. Il y a eu certes quelques progrès, mais dans la majeure partie des cas, les objectifs n’ont pas été atteints. 

Donc, aujourd’hui vous voyez l’idée de cette nouvelle constitution était justement l’un des points focaux, il fallait empêcher coute que coute que les modifications constitutionnelles permettent au président d’avoir des mandats supplémentaires, après les deux. Alors si aujourd’hui on est dans la dynamique d’un changement constitutionnel, cela revient à dire que toute la lutte que nous avions engagée pour la nouvelle constitution jusqu’en 2010, n’a pas porté fruit. 

Donc, partant de là, je tire la conclusion qu’une autre constitution ne permettra pas à la Guinée de parvenir au progrès démocratique, dont elle rêve. Pour moi, le problème fondamental de notre pays n’est pas la constitution. Le problème c’est l’objectif des dirigeants, la nature même des ressources humaines guinéennes. Le problème des Guinéens ce sont ses cadres, les ressources humaines que le pays dispose. 

Les cadres pensent beaucoup plus à eux-mêmes qu’à leur pays. Ce qui fait que quel que soit  la constitution que nous avons, nous ne parviendrons pas à obtenir le changement que nous voulons. 

Si les dirigeants cessent de promouvoir les cadres en fonction de leur militantisme, de leur engament politique, ils mettent l’accent sur le mérite et la compétence, nous aurons le changement souhaité.

Donc, à mon avis il n’est pas nécessaire aujourd’hui, de promouvoir une nouvelle constitution parce qu’en réalité ça n’amènera pas le changement qui est souhaité. Il faut que nous nous mettions ensemble pour consolider les bases de la démocratie. Et la consolidation des bases de la démocratie parte de la promotion de l’alternance. La Guinée doit pouvoir avoir sa première alternance en 2020. Ce serait un pas très important dans la bonne direction. Mais si un changement de constitution intervient aujourd’hui et que l’alternance n’intervienne pas en 2020, vous donnez l’opportunité au président qui viendra après le président Alpha Condé de trouver les astuces juridiques nécessaires pour se cramponner au pouvoir. 

Donc je pense que le président Alpha Condé en tant que premier président démocratiquement élu à la responsabilité de donner le coup d’envoi du respect du nombre de mandat en Guinée. Si le président Alpha Condé respecte le nombre de mandat il ôte à ses successeurs le droit de changer de constitution pour se maintenir au pouvoir. Je pensais qu’on pouvait gagner ce combat avec le Pr. Alpha Condé et on peut encore le gagner.

Une fois encore j’encourage le président Alpha à aller dans le sens de l’alternance en 2020, c’est une opportunité unique.

En dehors de cette crise, il y a les législatives qui aussi défraie la chronique dans la Cité. Les poids de lourd de l’opposition ont décidé de ne pas prendre part à ces élections. Quelle analyse faites-vous de cette situation ? 

J’ai retenu quelques faits marquant qui doivent retenir l’attention de tout le monde. La Guinée est un pays en voie de démocratisation. Ce n’est qu’en 2010 que nous avons eu les premières élections démocratiques. Donc aujourd’hui la Guinée ne peut pas se permettre ce que d’autres pays peuvent faire sans avoir de conséquences dramatiques. Mon souhait personnel est que les élections soient inclusives, qu’il y ait la participation de tous les partis. Ce qui en garantie la légitimité. 

La deuxième chose, c’est l’arrêt de la Cour suprême qui ordonne que les élections locales soient achevées. Je pense qu’il est important que le gouvernement se penche sur les moyens de finaliser ces élections là avant d’entamer le processus des élections législatives. 

En résumé, je pense que nous n’avons pas besoin de nouvelle crise. La Guinée a connu trop de crise, maintenant, il est important qu’elle apprenne à avancer avec le consensus dans le respect des lois, mais avec un minimum de consensus entre les acteurs politiques, la société civile et tout le monde. La Guinée pendant 10 ans encore aura besoin d’évoluer sur la base du respect des lois en tenant compte du minimum de consensus national. 

Selon vous Dr, après 60 ans d’indépendance qu’est ce qui empêche la Guinée de changer ?

Vous m’emmenez à vous dévoiler un peu quelques éléments du livre sur lequel je travaille actuellement. J’essaie de trouver les raisons pour lesquelles, la Guinée tourne en rond depuis les indépendances et qu’est ce qu’il faut pour qu’une ligne droite puisse être empruntée en se basant sur la démocratie et l’Etat droit. Je mène actuellement cette réflexion. Il se pourrait que le livre soit bientôt disponible…

Puisque vous parlez de livre, ça serra votre combientième œuvre ?

Ça sera le troisième livre. Le premier c’était ‘’la Guinée face aux défis de la démocratie’’ et le deuxième est un livre inter-multidimensionnel, un regard interdisciplinaire sur la situation des enfants, comment faire en sorte que les enfants soit un outil  de développement. Le troisième comme je vous le dit, c’est une réflexion basée sur des recherches pratiques pour à peu près savoir quels sont les obstacles au progrès de la Guinée, pourquoi la Guinée continue de tourner en rond pendant qu’elle a toutes les possibilités d’avancer. Je pense que ce livre sera édifiant pour tous ceux qui sont préoccupés pour le développement de la Guinée.

Vous avez écrits sur les enfants. Comment vous avez appris la nouvelle sur le décès de l’adolescent ivoirien, dont le corps a été retrouvé dans le tarmac d’un avion d’Air France à Paris… 

C’est vraiment choquant, c’est même désespérant de voir qu’un enfant de 14 ans puisse choisir de mourir dans le cockpit d’un avion plutôt que de grandir dans la société africaine avec tout ce que nous avons de valeureux. C’est tout simplement parce que nous n’arrivons pas à valoriser. Par exemple chez nous en Afrique, les enfants partent à l’école et la majeure partie du programme est adaptée à d’autres pays. Les programmes d’enseignements ne sont pas adaptés à nos réalités, ça fait que les enfants grandissent avec deux facettes. La première qui lui est donnée à l’école et la seconde qu’il reçoit à la maison qui ne compatisse pas forcément. Alors, ça donne à l’enfant un complexe, ça crée chez lui une sorte de perplexité, un complexe qui fait qu’au bout du compte l’enfant ne reconnait plus son identité. Il perd son identité et devient un être presqu’étrange à sa société. Quand il est avec les parents et les sages il a une facette, quand il est avec son vrai monde il a une autre. 

Or quand vous prenez les pays développés, les enfants ont une seule facette qui leur sont données et par la famille et par la société et par l’école. Par contre chez nous il y a plusieurs facettes, ça fait qu’au bout du tunnel, l’enfant ne sait même plus qu’est ce qu’il est réellement, quelle est la facette qui reflète son identité réelle, au finish l’enfant se trace une voie qui ne correspond ni à l’une des facettes ni à l’autre et ça fait que les sociétés africaines sont en danger. 

En Guinée surtout, dans plusieurs années on aura une société où les enfants n’auront pas des identités, où les voies que les enfants suivront n’auront aucun lien avec les aspirations que la société avait pour le développement de notre pays. 

Donc il est important que nous prenions conscience de cet état de fait, que nous travaillons à faire en sorte que l’éducation des enfants nous serve de tremplin contre les antivaleurs, à l’avenir que l’éducation des enfants garantisse le développement des valeurs auxquels nous aspirons, pour qu’au fur et à mesure que les années passent, notre pays renoue avec les valeurs et abandonne les antivaleurs. C’est la garantie pour que la Guinée de demain soit meilleure à celle que nous vivons aujourd’hui. 

Votre message

Mon message c’est d’appeler au calme. J’ai appris qu’il y a eu des violences à Kankan. Je joins ma voix à celle du Sotikèmo de Kankan pour appeler au calme et à la retenue. Tous ceux qui vivent à Kankan sont kankanais. Il n’y a pas de ressortissant du Fouta, de la Forêt ou de la Basse Côte à Kakan, il n’y a que des Kakanais à Kankan, tous ceux qui vivent à là-bas sont égaux en droit et en devoir. Il faut que chacun respecte la présence de l’autre, le vivre ensemble soit une réalité. Si les pères fondateurs de Kankan s’étaient recroqueviés à Kankan et n’avaient pas ouvert grandement la main à ceux qui venaient, Kankan n’allait pas être une grande ville aujourd’hui. 

Nous demandons à tout le monde de continuer d’œuvrer dans cette hospitalité qui fait la grandeur de Kankan et d’ailleurs de toutes les villes. Chaque guinéen est libre de s’installer partout où il veut et fonder une famille. Chacun doit se sentir chez lui. Il faut que les partis politiques sensibilisent leurs militants, que les familles éduquent les enfants dans ce sens.

Entretien réalisé par Sadjo Diallo