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Aboubacar Sylla, porte-parole du gouvernement guinéen dans les studios de RFI. RFI/Laurent Correau

En Guinée, un policier qui avait fait usage d'une arme létale lors d'une manifestation vient d'être mis aux arrêts. C'est l'une des rares mesures de sanction prises jusqu'ici suite à ce genre d'actes et elle intervient alors que les manifestations contre un projet de troisième mandat, la semaine dernière, ont conduit à la mort d'au moins trois personnes. Pourquoi si peu de sanctions ont-elles été prises jusqu'ici suite à l'usage de la violence dans le cadre du maintien de l'ordre ? Quelle lecture les autorités guinéennes font-elles par ailleurs des marches qui ont eu lieu la semaine dernière ? Pour en parler, notre invité est le porte-parole du gouvernement, Aboubacar Sylla. De passage à Paris, il répond aux questions de Laurent Correau.

RFI : Quels sont les faits pour lesquels un policier a été mis aux arrêts ?

Aboubacar Sylla : Un policier a été mis aux arrêts tout simplement parce qu’il s’est avéré qu’il a tenu une arme létale dans un périmètre de manifestation. Il n’était pas dans le dispositif de maintien d’ordre. Il appartenait à un PA et il se sentait menacé…

Un poste avancé…

Un poste avancé. Il a tiré des coups de feu en l’air. On le croit d’autant plus facilement qu’il n’y a pas eu ce jour de victimes, il n’y a pas eu de morts, il n’y a pas eu de blessés par balles. Mais il a violé une règle fondamentale parce qu’il aurait pu y avoir des victimes et c’est pour cette raison qu’il a été détenu. Notre pays a une image qui est dégradée par rapport au maintien de l’ordre en raison du fait que souvent il y a des victimes à l’occasion des manifestations. Mais nous avons toujours dit en tant que gouvernement que si nous avons des preuves, si nous avons des indices qui permettent de remonter jusqu’à l’origine de ceux qui tirent dans les manifestations, que ce soit des policiers ou des gendarmes ou des militaires ou des personnes qui ne sont ni membres des forces de l’ordre ni membres de la sécurité militaire, dans ces conditions, nous interviendrons, nous ferons des enquêtes et le droit sera dit. Le seul cas que nous avons connu où on a pu identifier un capitaine qui avait tiré sur un jeune après une manifestation, ce cas a fait l’objet d’un traitement judiciaire. C’était le capitaine Kaly, il a été arrêté et condamné à 10 ans de réclusion criminelle [Kaly Diallo condamné le 4 février 2019 pour le meurtre d’un militant en août 2016 en marge d’une manifestation de l’opposition NDLR].

Mais cela ne fait qu’une seule condamnation sur un bilan de plus de 120 morts, selon l’opposition en 9 ans. Comment expliquez-vous ce décalage ?

Il n’y a pas de preuves qui permettent d’identifier ceux qui tirent. Il y a trop de perturbations des scènes de crime. Lorsqu’il y a des crimes, il ne faut pas déplacer les corps. Il faut attendre que les officiers de police judiciaire viennent pour commencer l’enquête. Et à partir de là, cela sera peut-être possible d’identifier les coupables et de les traduire devant les tribunaux. Ce n’est à l’honneur de personne que les manifestations en Guinée se traduisent par autant de morts.

Il y a une semaine démarrait une nouvelle vague de manifestations du Front national pour la défense de la Constitution (FNDC). Quel message entendez-vous monter de la rue au travers de ces mouvements ?

Je dois vous dire d’abord qu’il ne s’agit pas de manifestations ordinaires. L’opposition guinéenne, qui s’est alliée à une tranche de la société civile, a décidé tout simplement de créer une atmosphère délétère dans le pays, de créer une atmosphère chaotique. Et je dirais même l’opposition s’est inscrite dans un agenda putschiste pour mettre un terme à un mandat qui est en cours, celui du président Alpha Condé.

Pourquoi parlez-vous d’« agenda putschiste » ? Qu’est-ce qui vous fait dire cela ?

Ce qui me fait dire cela, ce sont les discours de l’opposition dans le cadre du FNDC. Elle affirme publiquement qu’il s’agit de demander aux militants de sortir dans les rues, de barricader les routes, de s’attaquer à tous les symboles de l’État et de faire en sorte que la désobéissance civile s’installe avec en arrière-pensée qu’une insurrection se déclenche, aboutisse à un coup d’État militaire et qu’on soit dans une période de transition.

Donc, pour vous, il n’y a pas de message politique ?

Il n’y a pas de message politique, parce que la motivation qui est mise en avant, à mon avis, elle ne peut pas être considérée comme une motivation qui peut justifier tant de violences. Lorsqu’on mobilise des populations, simplement sur la base d’une éventualité -on parle d’éventuel troisième mandat-, sur la base d’intention non manifestée encore, je dis ça veut dire qu’il y a un agenda politique derrière.

Mais il y a quand même un message qui est de dire : non à un troisième mandat du président Alpha Condé…

Mais le troisième mandat n’est pas à l’ordre du jour aujourd’hui en Guinée. Aujourd’hui, nous sommes en train de parler d’une nouvelle Constitution pour une raison très simple. D’abord, notre Constitution, la Constitution actuelle, ça semble surréaliste, n’est pas une Constitution qui a été adoptée par le peuple de Guinée.

Mais vous savez bien qu’avec un nouveau projet de Constitution, le président pourra se présenter pour un nouveau mandat ?

C’est une éventualité, mais ce n’est pas une fatalité. C’est une éventualité, c’est vrai.

Le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, a estimé ces derniers jours que l’engagement du président Alpha Condé à demander une réforme de la Constitution ne paraissait être partagé ni par sa population, ni par ses voisins. Est-ce que vous pensez qu’il fait un diagnostic correct ou incorrect ?

En dehors du fait que les problèmes de Constitution relèvent, j’ai envie de dire exclusivement, mais en tout cas essentiellement des Guinéens -c’est une affaire guinéo-guinéenne-, en dehors de cette question, je dirais que monsieur Le Drian ne s’est pas prononcé de manière formelle contre le projet de Constitution. Il a dit dans un langage très diplomatique qu’il paraît qu’une partie de la population ne serait peut-être pas en accord avec cette révision.

Il lui semble que la population est contre ce projet. Diagnostic correct ou incorrect ?

Tout à fait incorrect. Je vais vous donner la genèse de ce référendum. Ce référendum est venu du fait qu’une grande partie de la population guinéenne s’est exprimée dans des manifestations plus importantes que celles que vous voyez aujourd’hui de la part du FNDC.

Donc, en dépit des trois mois de manifestations, vous dites : la population est pour ce changement de la Constitution.

La population en grande majorité est pour. Pas toute, heureusement, nous sommes dans une démocratie. Il n’y a pas d’unanimité en démocratie. Il y a beaucoup de Guinéens qui sont mobilisés, et pas seulement à Conakry, à l’intérieur du pays, en faveur de cette Constitution.

L’opposition a décidé de suspendre les manifestations contre un troisième mandat, est-ce qu’il y a là une opportunité à saisir ?

Nous, nous avons toujours fait réclamer le dialogue. Nous avions créé un cadre de dialogue il y a à peine un mois dont je faisais personnellement partie. Le cadre du dialogue s’est tenu. Il y a eu juste deux sessions de dialogue. L’opposition après s’est retirée sans accepter qu’on mette sur la table toutes les questions, qu’on en débatte, qu’on en discute de fond en comble pour qu’on reste dans ce cadre de concertation au lieu de descendre dans la rue. Je dois vous dire aussi que cette suspension des manifestations du FNDC, c’est une suspension de fait, parce que le FNDC avait décidé que les manifestations devaient continuer sans discontinuer jusqu’au départ du professeur Alpha Condé du pouvoir. C’est parce que le FNDC s’est rendu compte que les mots d’ordre de manifestations n’étaient plus suivis, qu’après 24 heures, 48 heures, la manifestation s’était essoufflée, que Conakry la capitale et les villes de l’intérieur avaient repris leur train quotidien, que le FNDC a décidé de « suspendre » les manifestations et de les reprendre lundi prochain.

C’est en tout cas le bilan que font les autorités, ça n’est pas le bilan que l’opposition fait de ces manifestations. Comment peut-on sortir de la crise qui s’est installée depuis trois mois dans le pays ?

La crise ne pourra être résolue que par le dialogue. Le gouvernement a la main tendue vis-à-vis de l’opposition qui met des conditions et des obstacles quasi insurmontables pour aller à ce dialogue. Donc, des deux côtés, la tolérance doit être de mise. Je crois que l’appel lancé aux forces de l’ordre, c’est d’être professionnelles et de savoir que le maintien d’ordre ne s’accompagne pas nécessairement d’une certaine forme de violence, puisque ceux qui sont en face ne sont que des Guinéens qui sont mus par des idées qui sont différentes et qui souhaiteraient donc se faire entendre. Les manifestations en Guinée aussi sont d’une rare violence, c’est vrai. Je vous ai parlé de tout ce qui a été brûlé, incendié, des commissariats de police, des postes de gendarmerie, des domiciles de préfets, tout ce qui est symbole de l’État. Des préfets ont été même chassés, et certains gendarmes et policiers ont été tués dans les affrontements. Je crois que tout le monde doit savoir raison garder et chacun rester parfaitement dans son rôle.

Rfi : Laurent Correau