Conakry, un matin sous tension. Aliou Bah, leader charismatique de l’opposition guinéenne, est arrêté dans des conditions encore floues. La nouvelle se répand comme une traînée de poudre, provoquant un choc au sein de la population et de la communauté internationale. Devant les locaux de la police où il est détenu, une foule inquiète s’amasse, scandant des slogans réclamant sa libération.
Une indignation unanime. L'arrestation d'Aliou Bah n’est pas un simple fait divers, mais l'énième épisode d'une série noire qui frappe les figures critiques du régime. Des universitaires, des journalistes, des activistes et des membres d’organisations de la société civile haussent le ton. Dans un texte collectif, 150 personnalités tirent la sonnette d’alarme sur une stratégie d’élimination systématique des opposants orchestrée par le Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD). « La Guinée est prise dans un étau répressif », lance un analyste politique.
Une spirale répressive
L’affaire Aliou Bah s’inscrit dans un contexte lourd. Depuis juillet, deux opposants sont portés disparus, enlevés dans des circonstances troubles. Les décès suspects de deux officiers militaires – dont un ancien chef d’état-major – alimentent les craintes d’une chasse aux sorcières. Dans les quartiers populaires de Conakry, les discussions tournent inlassablement autour de cette érosion des libertés fondamentales.
Des détenus dans des conditions indignes. Aliou Bah est enfermé dans des conditions qualifiées de « dégradantes » par son parti politique. « C’est une tentative d’humiliation et de découragement », dénonce un proche collaborateur. Dimanche, son mouvement politique a exigé sa libération immédiate. L’historien Achille Mbembe, à la tête de la Fondation pour l’Innovation et la Démocratie, s’est également exprimé : « Nous assistons à un retour spectaculaire des violations des droits humains en Guinée. »
La presse muselée
La liberté d’expression est elle aussi mise à rude épreuve. Habib Marouane Camara, directeur du site d’information Lerevelateur224, a été arrêté dans des circonstances opaques le 4 décembre. Ce n’est pas un cas isolé. De nombreux journalistes subissent des pressions croissantes, alimentant la peur d’une censure totale.
« Nous sommes en train de perdre la bataille de l’information », confie un rédacteur sous couvert d’anonymat. Des salles de rédaction ferment leurs portes, incapables de faire face aux intimidations. « C’est tout l’espace civique qui se referme », explique un militant des droits humains.
Une transition en panne
Lors de sa prise de pouvoir, la junte avait promis une transition vers un régime civil d’ici fin 2024. Mais les engagements s’effacent au profit d’un autoritarisme croissant. Les espoirs de démocratisation s’éloignent, laissant place à un sentiment d’impuissance.
« L’arrestation d’Aliou Bah est un symptôme, pas une exception », affirme un chercheur en science politique. Selon lui, la Guinée risque de sombrer dans une crise durable si des mesures concrètes ne sont pas prises pour inverser cette tendance.
La mobilisation monte. Des manifestations sporadiques éclatent à Conakry et dans d’autres villes du pays. Sur les réseaux sociaux, le hashtag #FreeAliouBah gagne du terrain. Reste à savoir si cette pression suffira à infléchir la ligne du CNRD.
Dans les rues de Conakry, l’inquiétude est palpable. Chaque interpellation, chaque disparition, chaque voix étouffée renforce un sentiment d’urgence. La question qui hante les esprits est claire : jusqu’où ira cette dérive autoritaire ?
Idi Diallo