Conakry, 13 février 2025 – L’air est lourd dans la salle où se pressent journalistes et militants. L’affaire Aliou Bah n’a pas fini de faire parler d’elle. Deux ans de prison ferme pour offense et diffamation envers le chef de l’État : une sentence qui, pour ses avocats, ne relève pas du droit, mais d’un acharnement politique. Ce jeudi, devant une audience attentive, le collectif de défense a annoncé saisir la Cour de justice de la CEDEAO. Un ultime recours contre ce qu’ils qualifient de « justice sous influence ».
Un procès politique sous couvert de droit ?
Me Houleymatou Bah, figure emblématique du collectif, ne cache pas son indignation. Son regard balaie l’assemblée avant qu’elle ne lance, cinglante : « Ils ont déjà réduit au silence les médias influents, maintenant, ils veulent faire taire les voix discordantes. Devons-nous accepter cela sans réagir ? » La salle approuve dans un tonnerre d’applaudissements. Ce n’est pas seulement la défense d’un homme qui se joue ici, mais celle d’un principe fondamental : la liberté d’expression.
La justice, un bras armé du pouvoir ?
Depuis des mois, la question hante les débats. Me Bah n’hésite pas à pointer du doigt une magistrature qu’elle accuse de complaisance. « Ils ne pourront jamais prouver qu’ils ont reçu des instructions, mais leurs décisions parlent d’elles-mêmes. Ils veulent plaire au palais, et cette soumission met en péril tout le système judiciaire », assène-t-elle, le ton ferme.
Et comment ne pas s’interroger ? Pourquoi la Guinée, signataire de plusieurs conventions internationales sur les droits humains, peine-t-elle tant à les appliquer ? Pourquoi ce qui est admis ailleurs – au Sénégal, en Côte d’Ivoire – semble ici impossible ?
Un avertissement pour l’avenir
Le collectif ne décolère pas et met en garde : cette condamnation, loin d’être un simple fait divers, est un précédent dangereux. « Aujourd’hui, c’est Aliou Bah. Mais demain, à qui le tour ? » La question résonne comme un avertissement. Une justice forte est le socle d’un État stable, rappelle Me Bah. Si nous laissons faire aujourd’hui, demain, plus personne ne sera en sécurité devant la loi.
Le combat pour la libération d’Aliou Bah ne fait que commencer. Ses avocats sont déterminés à aller jusqu’au bout. Au-delà du cas de leur client, c’est l’avenir de la démocratie guinéenne qui est en jeu.
Algassimou L Diallo