Ce mercredi matin, la Cour d’appel de Conakry est le théâtre d’une audience sous haute tension. Avocats, journalistes et militants se pressent dans une salle bondée pour suivre le procès en appel d’Aliou Bah, leader du parti ModeL, condamné en première instance pour "offense et diffamation contre le chef de l’État".
Un dossier hautement politique qui pose une question cruciale : la justice guinéenne est-elle encore au service du droit ou s'est-elle muée en instrument de répression ?
Un tribunal sous pression
Face à la présidente de la Cour, Hadja Fatou Bangoura, Aliou Bah reste droit dans ses bottes. "Ces charges sont infondées. Mon combat a toujours été celui des idées, dans le cadre de la loi", martèle-t-il d’une voix assurée. Mais pour le pouvoir, la critique a franchi la ligne rouge.
L’affaire trouve son origine à la frontière de Pamelap, où Bah a été arrêté alors qu’il s’apprêtait à quitter le pays. Selon lui, aucune notification ne lui a été présentée avant son interpellation musclée. S’ensuivent plusieurs nuits en cellule dans des conditions qu’il qualifie de "dégradantes" avant son placement sous mandat de dépôt.
Un symbole de la répression politique ?
Dans la salle d’audience, ses partisans sont résignés mais déterminés. Pour eux, ce procès va bien au-delà de la personne d’Aliou Bah : il traduit la dérive d’une justice accusée de se plier aux exigences du pouvoir. "Aujourd’hui, on criminalise la parole politique", dénonce l’opposant.
Son sort repose désormais entre les mains de la Cour d’appel. Confirmera-t-elle la sentence, renforçant ainsi la répression des voix dissidentes ? Ou amorcera-t-elle un virage en faveur de la liberté d’expression ?
Une chose est sûre : au-delà d’Aliou Bah, c’est toute la vitalité du débat démocratique en Guinée qui est à l’épreuve.
Aziz Camara